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REDESCENDRE SUR TERRE

mai 5, 2021

mensonges et aberrations médiatiques suite aux bagarres du 1er mai

Le 1er mai 2021 a été mouvementé et la presse se fait l’écho de propos aussi absurdes les uns que les autres. Toujours à l’affût du moindre fait divers susceptible de commentaires haineux. Tout est confus. Tour à tour, les coupables seraient des Gilets Jaunes, les autonomes, des ultras, les blacks blocks, ou l’extrême droite !

Brandir le spectre de l’extrême droite est audacieux… mais surtout dangereux. D’une part, parce qu’une telle affirmation empêche de comprendre les conflits qui traversent les mouvements sociaux. Ensuite, elle diffuse une peur de l’extrême droite et de sa violence, sans y apporter de solution. Et il n’est pas nécessaire d’attribuer à l’extrême droite plus de forces qu’elle n’en a déjà. L’un des arguments pour affirmer qu’il s’agit d’une attaque de l’extrême droite est que des insultes homophobes, sexistes et racistes auraient fusé. Sauf que ce n’est pas là la marque de l’extrême droite, malheureusement : de nombreuses insultes du langage utilisé couramment sont discriminantes. D’ailleurs, le SO de la CGT avait déjà tabassé des femmes à Paris aux cris de « sales putes » ! Avant de prétendre que l’extrême droite a attaqué la CGT, Martinez ferait bien de se souvenir des exactions dans ses rangs. Un autre argument consiste à dire que les manifestants attaquants étaient armés avec des pierres et des bâtons. Quand le SO se trimballe avec des matraques, des battes de base ball et des gazeuses, il serait peut-être bon d’éviter ce type de réflexion.

A noter quand dans tous les mouvements sociaux, des discours d’extrême droite sont présents, même lorsque les groupes fascistes se font virer des cortèges, comme c’était le cas pendant les Gilets Jaunes.
Les préjugés racistes sont partout, tant la propagande sécuritaire et xénophobe du pouvoir marche à plein régime. La pratique des luttes, les liens, la rencontre, la confrontation au réel loin des plateaux télé, permet bien souvent de casser ces préjugés. En revanche, désigner l’extrême droite là où elle n’est pas est inutile dans la lutte contre le fascisme.

Dans le même temps, on assiste à un déferlement d’assertions pour le moins étonnantes.

« Les blacks blocks sont en train de tuer le droit de grève » scande Xavier Bertrand, ministre du travail sous Sarkozy. C’est lui qui a mis en place le service minimum, dispositif qui sert à priver la grève de son effet…

Elizabeth Borne est scandalisée que les « casseurs, les blacks blocks, aient voulu voler ce moment aux organisations syndicales ». Elle qui a mis tant d’énergie à continuer de saquer le code du travail et à faire payer la crise aux travailleurs et travailleuses.

Marlène Schiappa estime « absolument inacceptable et intolérable que de s’en prendre à des gens qui manifestent ». Pour une fois, nous nous trouvons en complet accord avec elle : il est parfaitement scandaleux que la police gaze les manifestantes et manifestants et leur tire dessus à coups de LBD.

Elle livre ensuite un sentiment très révélateur en expliquant qu’elle ne craint pas les revendications des syndicats, mais une explosion sociale qui ne viendrait pas des structures syndicales. C’est précisément là que le bat blesse.

Il s’agit, pour les directions syndicales, de reprendre la main sur les manifestations. En effet, depuis le cortège de tête de 2016 en passant par les GJs, une partie des manifestantes et manifestants ne veut plus des défilés gentillets sans lendemain, bien cadrés par les organisations syndicales et la police. Une partie du monde syndical se retrouve d’ailleurs dans ce cortège de tête, de la même manière que des sections syndicales entières étaient dans la rue en gilets jaunes dès les premiers jours du mouvement, entrant en conflit avec leur direction. Le monde syndical n’est évidemment pas homogène. Il s’agit donc d’un conflit entre ce qui veut contrôler et ce qui veut être incontrôlable, ingouvernable. Mais certainement pas, comme on a pu le lire même dans la presse de gauche, entre les « blacks blocks » et les travailleurs et travailleuses. Énoncer ces catégories est un non-sens total et vient appuyer la propagande du pouvoir contre le cortège de tête.

Et Martinez, faut-il s’en étonner, s’engouffre dans la brèche. Il va jusqu’à demander l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire sur le maintien de l’ordre. En d’autres termes, il fait appel à la répression contre le cortège de tête. Une enquête a déjà été ouverte par le parquet pour violences volontaires et dégradations. Martinez en rajoute une couche.

C’est la grande erreur de presque toutes les organisations de gauche dans cette affaire : s’être précipité à réagir et sur-réagir à coups de communiqués et de tweets pour « condamner les violences », livrant une analyse à peu près nulle de la situation. Et ouvrant la voie à une batterie de mesures répressives. C’est un retour en arrière : il semblait qu’une large partie des forces progressistes s’était enfin aperçu que les armes et techniques policières exercées à l’encontre des manifestant.es, avaient d’abord été testées dans les quartiers populaires, et qu’elles sont tout autant à combattre dans les quartiers que dans les manifestations. Là, en faisant appel aux forces du maintien de l’ordre pour sécuriser les cortèges syndicaux, Martinez prend position pour la répression du moment qu’elle ne vise pas ses troupes syndicales qui défilent dans le calme. En d’autres termes, il prend le parti de la violence de la police quand elle s’exerce contre le cortège de tête.

Peut-on imaginer une personne masquée et habillée tout en noir refuser de donner du sérum physiologique ou du maalox à une personne en chasuble rouge ? Non. Face à l’abjection de Martinez qui réclame toujours plus de répression pour celles et ceux qui souhaitent être ingouvernables, nous devons opposer une solidarité sans faille face à la répression.